jeudi 31 juillet 2014

Mongolie: Ulaambataar- Mangdalgovi




Mais quelles sont ces chuchotements a l'extérieur de la tente? On met le nez dehors et on se voit servir oranges fraîches et café chaud! Sanne et Michiel sont entrain de nous préparer le petit déjeuner. Des crêpes s'il vous plaît, sucrées et salées, partagerions-nous la route avec deux majordomes? On termine ce festin par un second café mais une moto fonce droit sur nous. C'est la police: Il faut partir vite, vous vous trouvez en plein sur le tracé de la course de chevaux de Naadam! On déguerpit. Alors qu'on regarde passer les concurrents aux montures galopantes malgré les 25 kilomètres de course qu'elles sont sur le point d'achever, jaillit dans notre dos Chultem, un lanceur d'osselets rencontré il y a trois jours a Ulaambaatar et avec qui nous avions sympathisé. Lui parle français et il est accompagné par son amis qui s'exprime parfaitement en hollandais. Ne me parlez pas de hasard! Notre camp se trouvait près d'un Cairn et nous sommes évidement invité à prendre part au rituel d'hommage rendu a chaque passage devant un tel édifice. Un petit verre de Vodka est servi tour a tour a chaque personne présente, d'abord l'accepter de la main droite, tremper son annulaire droit dans le liquide et à l'aide du pouce, éjecter un peu de liquide vers les cieux pour remercier la Nature, le reste... on peut le boire... il est 9h00 du matin, santé, cul sec!


Effectivement, c'est claire... on se trouve en plein champs de course...



La route qui nous éloigne de la Capitale est bordée de camps de yourtes autour desquels paissent quantité de chevaux, les courses de Naadam ne sont apparemment pas finies. Par endroits des arbrisseaux tapissent le recreus des vallons, l'herbe est haute et grasse. Le soir même, nous campons aux abords d'une rivière se languissant nonchalamment juste après le village de Lun. L'endroit est invraisemblable, il y rodent cochons, chiots, vaches et veaux et hordes de chevaux. Tous paraissent si heureux, libres dans cet Eden sans clôture! Un groupe d'hommes vient nous rejoindre, ils guettaient depuis un moment la fin de notre repas pour nous offrir de partager leur dernière bouteille de Vodka. Nous n'avons que du café et des biscuits à proposer en échange, ça ne fait rien, toute la troupe est enchantée de converser un moment à propos de nos pérégrinations. Nous, on les interroge sur Naadam, leur famille, leurs bêtes... Deux d'entre eux sont venus à cheval et nous font monter en selle pour une photo souvenir. Ils sont saouls bien sure, mais toujours aussi fiers et joviaux. Quelle incroyable Mongolie, et nous ne sommes pas au bout de nos surprises...


Les Bien Heureux pres de Lun


Le jour suivant, Jean-Da et moi, nous nous arrêtons inopinément au bord de la route. Le lieu semble tout à fait quelconque et n'a aucun charme particulier, pourtant, c'est là précisément que nous atteignons la barre des 20'000 KM à vélo sur les routes du Monde, Youhouhou!!! La moitié de la circonférence de la Terre dit Jean-Da... à moins que ce ne suis 42'000 KM??? Dans le doute, on décide qu'on reboira une bière dans 1000 KM, car oui, Jean-Da avait garde précieusement une mousse au fond de sa besace pour célébrer l'occasion! Santé (encore!)!


Les 20'000 km!



Un peu plus loin, on s'arrête à une bâtisse en bois flanquée de trois yourtes, on a besoin d'eau. Un adolescent au sourire déconcertant de bienveillance remplit nos bouteilles avant de nous inviter à pénétrer dans la yourte familiale. Il nous présente sa famille, sa moto, les trois chèvres... Assis par terre, on se voit servir du lait chaud qu'on appelle ici thé et des galettes biscuitées sucrées, spécialités de Naadam, qu'il faut tremper dans de la crème onctueuse... un délice! La pièce est agencée de meubles massifs en bois, toutes les lattes du la toiture sont gravées de motifs fins et les piliers centraux soutenus par des tortues du même matériau, symbole de longévité. Le mobilier est dispose de façon traditionnelle, au fond, l'hôtel avec les icônes et les nombreuses photos des ancêtres. Les sabots de bois miniature (symbole de la Hollande) offerts par nos amis cyclovoyageurs vont rejoindre promptement les bibelots disposés sur les deux commodes qui le flanquent. Ensuite, il y a l'espace couchette et les armoires de rangement près de la porte. Au centre le poêle. Il régne ici, plus encore qu'à l'extérieur, une atmosphère de Paix, de Tranquillité et d'Harmonie.

A peine arrivons nous sur le site de notre campement du soir que déboule une voiture. En sortent un homme plein d'entrain et son fils. Ni une, ni deux, il nous enjoint de monter un abri contre le soleil (une bâche tendue sur un vélo), allume un petit feu de bouses sèches dont la fumée fait furie les nombreux et ennuyeux insectes. Il étend une bâche sur le sol et nous propose de partager une bouteille de bière en sa compagnie: Touldo Horre! (Ça semble vouloir dire "Santé!" en Mongole phonétique...). C'est homme ne fait que babiller, il accompagne son verbiage de gestes ce qui nous aide à cerner son propos. Si on aime la Mongolie? OUI, on Adore (pouce en l'air), content du résultat, le voilà qui habille Jean-Da en vrais cavalier des Steppes (blouse et chapeau) et pose avec lui pour la photo. Les femmes (doigt sur le lobe de l'oreille pour indiquer la boucle d'oreille) s'occupent de traire (mouvements alternatifs de haut en bas des deux main positionnées comme si on tenait un verre dans chacune d'elle). D'ailleurs mes vaches sont là (il indique une petite yourte un peu plus loin). Les hommes (index poser entre le nez et la lèvre supérieure pour indiquer la moustache, bien que les Mongole n'en portent pas), nous, on monte la cheval! Pour preuve son fils sort une selle rudimentaire du coffre de la voiture, pose fièrement, il tient à figurer sur la photos aussi, il a fait un bon résultat à la course de Naadam (ce sont les jeunes enfants qui montent les chevaux, car ils sont moins lourds, ce qui permet aux bêtes d'être plus rapides). D'ailleurs, voilà que sa monture passe sur la piste qui se dirige vers son village, avec quelques congénères, dans une camionnette, leur tète dépassant en quinconce de chaque coté du véhicule. Comment les font-ils monter là dedans? L'homme rit, il est fier de son histoire, c'est notre sauveur, nous avions chaud, étions arasés pas les insectes... il arrive et nous arrange tout ça illico presto. Je sens que ce soir au village, ces compères n'ont pas fini d'entendre son récit!!!


"I'm a poor lonesom Cowboy!"



En selle!

Le lendemain, alors que nous déjeunons dans la relative fraîcheur du matin, une femme s'approche avec un plein seau de lait frais. L'homme lui a sens doute demandé de nous apporter cette offrande. Elle explique pas gestes aussi: Il faut le faire bouillir et après seulement tu peux boire! Mais surprise, au milieu de l'opération, le lait se sépare... Jean-Da n'est pas à court de ressource, à l'aide d'un tissus, il filtre le petit lait et nous sert un bon fromage frais pour agrémenter nos céréales.



Apparaissent bientôt des champs jaunes, serait-ce du colza? D'autres vert fonce marquent les plantations de blé. Étonnant, c'est la première fois que l'on voit des cultures dans ce pays. D'autres espaces carrés, plantés de fleurs violettes attirent notre attention. C'est beau ce mélange de couleurs, sur fond de vert, vert et vert toujours. Tous ces chevaux qui semblent nous saluer en secouant la tête à notre passage, ces vallons qui se succèdent et ces regards si sages, si tendres, si posés, des curieux observateurs dans les voitures qui vous dépassent. On se sent bien ici, le temps semble ralentir, s'arrêter presque, et la vie semble plus intense, présente à chaque instant.



Etendue de verdure



Erdenesant, station terminus! C'est là que nous quittons la route pavée pour nous plonger dan les profondeurs de la pureté d'une Mongolie encore vierge de goudron (et pourvu que ça dure, oh oui, faites que ça dure!). Pour préparer l'épopée, on court de boutique et boutique, amassant pain, saucisses, conserves et boisson... coup de chance (encore!), Julien et Amélie, deux Normands en vadrouille en camion, viennent agrémenter nos achats avec des pâtes russes et de la crème fraîche française. Merci les copains, bonne suite de voyage en Asie Centrale! Notre curry de pommes de terre du soir a eu, grâce à vous, une saveur particulière... des petits airs de Bleu-Blanc-Rouge! MIAM!!!



Shopping Center version Mongole



Cela fait moins de 20 KM qu'on a quitté le bitume et nous voilà déjà perdus, douche froide. Quelle misère, comment allons nous faire pour atteindre Mangdalgovi  à quelques 350 KM de là? Nous avons pourtant suivi les indications données par les locaux et tenté de repérer la trace la plus large et fréquentée à chaque intersection... mais celle-ci finit en sentier à peine visible dans l'herbe qui reprend ses droits. Un cavalier gardiens de chèvres s'approche, on tente de lui expliquer notre destination (j'ai un papier sur lequel les noms des bleds qu'on doit rallier sont écrits en cyrillique). Il faut prendre plus au Sud, on croit comprendre qu'on devrait suivre les poteaux électriques... Après quelques kilomètres le doute subsiste, la piste tire indubitablement vers l'EST. Les mesures de la boussole de Jean-Da le confirment. On arrête une voiture, ces pilonnes vont vers Bruen, non pas vers Delgerhaan... va pour Buren on rejoindre Delgerhana plus tard. La piste n'est pas si mauvaise. Oui, par moments, la tôle ondulée nous secoure dans tous les sens, par d'autres, le sol sableux nous cloue net sur place ou nous fait déraper, mais dans l'ensemble, c'est plutôt bien. C'est globalement plat, mais chaque petit replis de terrain forme une colline à part entière, derrière chaque pente, une découverte. De loin en loin, des yourtes blanches, bouées sur un océan vert, des troupeaux de chèvres et de moutons, des hordes de chevaux trappus, calmes et vigoureux.


Borne information Mongole



Bouee solitaire


Buren est une victoire, nous l'avons fait, nous nous sommes orientés dans ce vide sidéral, on peut être fiers de nous. Pour fêter ça et pour recharger les batteries des caméras, on mange à la cantine et on découvre une fois encore, à quel point l'excès d'alcool peut changer les gens. Les Mongoles si charmants, bien intentionnés et tendre à jeun, peuvent devenir casse-pieds, sans gène, voire agressifs une fois pompette. Michiel doit se fâcher, on déguerpit!



Pas de panneau indicateur donc...

Par miracle se sont encore des pilonnes électriques qui nous guident jusqu'à Delgerhaan, qu'on atteint malheureusement sous une pluie tenace. Nous sommes instantanément l'attraction du village et notre repas pris dans l'entrée couverte d'une épicerie se transforme vite en spectacle. On a froid et on peine à se réchauffer. C'est sens compter sur l'hospitalité de la famille de Jack qui nous invite dans son salon pour une tasse de café chaud. Le chef de famille ne noua accorde aucun intérêt, passionné qu'il est par la course de Naadam retransmise à la télévision, mais tous les autres membres, ainsi que les voisins, nous ont à l'oeil, épient nos moindres gestes. La pièce d'environ 25 m2 compte quelques 18 personnes. Nous ne sommes que le second groupe de touristes de passage dans ce bled cette saison, le premier comptait 4 motards. Imaginez l'évènement!




Journee pluvieuse en compagnie des chevaux jouasses



Plus de poteaux électriques, il faut se contenter de la lecture de terrain, de son flaire et de la boussole... Jean-Da excelle dans les trois domaines! Tans mieux pour nous! Mais là, on hésite.. Et si on allait d'abord faire le plein d'eau, il semble y avoir une pompe un peu plus loin? Fermé, il va valoir se contenter de filtrer le contenu de l'abreuvoir... Une moto arrive, l'homme a les clés, la pompe tourne et son moulin à paroles également. Il en raconte, on comprend rien, on distingue seulement qu'il tient beaucoup à nous inviter chez lui, la yourte juste là bas. Jean-Da et moi avons un bon feeling, on y va! Et nous ne serons pas déçus! A peine arrivés, on se voit offrir du fromage de chèvre séché, un bol de nouilles assorti de viande qui se présente sous forme de lanières sèches (comme des cordelettes de cuire) et qu'il faut broyer à l'aide d'un marteau et faire bouillir longtemps pour obtenir des moreaux délicieux et tendres qui donnent un goût fumé à la pitance. Nos cartes géographiques et photos de Suisse sont prises d'assaut. Nos hôtes s'intéressent à notre périple autour d'Airag (lait de jument fermanté) et de petit lait de chèvre fermanté aussi. L'hôte sert une tasse à un convive, il faut boire les 3/4 et la rendre afin qu'elle soit remplie à nouveau et offerte au prochain. On fume, on boit, on cause, tout ce passe naturellement. On plane totalement, que faisons nous là, au milieu de cette immensité vierge, immergés dans cette yourte mongole, en compagnie de cette famille à laquelle on se sent déjà appartenir? Merci Providence, merci Bonne Étoile. On est là, tellement là, et ne voudrions être nulle part ailleurs. Les choses s'accélèrent, on nous présente toute la famille sur papier glacé, on nous fait revêtir l'habit traditionnel et s'empresse de nous prendre en photo, on nous fait monter sur les motos du clan, on nous explique, démonstration à l'appui, tout le processus de fabrication du délicieux fromage que l'on grignote en permanence. C'est l'heure de la traite, au boulot. Jean-Da attrape les chèvres par une patte arrière, les hommes les attache et moi, je rejoint la troupe des femmes tentant à grand peine de faire sortir quelques gouttes de lait des mamelles pourtant pleines. Mon seau est bien plus vide que ceux de mes compagnes. Les chevrettes sont libérées, on va mettre le fromage sous presse. Demain, on en coupera des tranches que l'on fera sécher à l'ombre de la yourte. Les choses s'accélèrent encore, d'autres amis arrivent avec de la Vodka et de la bière, même les femmes se mettent à fumer... Je perds pied, c'est délicieux! La nuit tombe lentement, les invités s'éclipsent. On nous dévoile les broderies "précieuses" et une petite bouteille nacrée qui contient une poudre qu'il faut sniffer à l'aide d'une cuillère minuscule. Concert d'éternuements, et rire général. Que nous est-il arivé? Est-ce bien réel tout ça? Nous vivons là des moments magiques, précieux et rares. La Mongolie, un coup de coeur, coup de foudre... que dire d'autre?!


Habilles a la mode locale

Sur les chevaux modernes

Nos hotes a la traite



Le fromage seche, le temps s'ecoule

Au matin, les au revoir mouillent les yeux. La maîtresse de maison ponctue l'événement par un acte de bénédiction: se tourner vers le Nord-Est, pointer sa main levée, paume vers l'intérieur du corps, en dessus de la tête, puis devant le nez et jeter en l'air un bol de lait, entrer dans la yourte, en faire le  tour dans le sens des aiguilles d'une montre en s'arrêtant devant l'hôtel de Bouddha, déguster un bout de fromage et faire tourner un moulin à prière, puis ressortir pied droite en avant. Merci, merci, que de générosité, de tolérance et de volonté de partager. MERCI!


Dans la Yourte de notre famille d'un jour
A Erdenedalay, Sanne et Michiel décident de prendre un véhicule pour rejoindre Mangdalgovi. Une insolation a anéanti Sanne. Que le vent vous porte loin compagnons du voyage, aussi loin que vos rêves. Belle aventure à vous! Jean-Da et moi parcourons seuls les quelques 120 KM qui nous séparent de cette ville. La solitude renforce le silence, le calme, aiguise la contemplation, fait naître un état méditatif pendant les longues heures de pédalage. Bien que nous ne croisions qu'une dizaine d'âmes qui vivent par jour, la piste est large, pas question de s'égarer, le décors est sans fond...nos coeurs s'y plongent, nos esprits s'y perdent, nos âmes y rêvent. 


Temple Bouddhiste a Erdenedalay

Campement solitaire aux abords de Erdenedalay

1 commentaire:

  1. Bonjour,
    Quelles belles photos.
    Un ciel bien étrange dans étendue de verdure.

    Cordialement

    Cordialement

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