samedi 28 septembre 2013

Inde / Ladakh/ Kashmir: Leh-Padum

EUHHH! Comment raconter notre départ de Leh? Au premier plan des zones militaries, terrain plutôt descendant, montagnes beiges dans le fond, sablonneuses, totalement vierges de végétation… Voilà pour mes souvenirs, notre dernière nuit en compagnie de tous les cyclos de passage à Leh a brouillé le reste. Ça faisait 6 mois que nous n’avions pas célébré de la sorte et le marteau piqueur dans ma tête et la brûlure dans mes poumons (du a trop de fume) en attestent. Leh n’a pas été un coup de coeur, ambiance bobo à volonté et frime sur des motos de location, mais ça nous a fait du bien de consommer de la prestation (internet, resto, boulangeries à l’européenne, café-terrasse…) et de nous relâcher complètement en compagnie de Kevin (qui pour sure ne transportera aucun poids mort en haut d’un col), de Petra et Sebastien (cyclos allemand et suisse), de Richard et Stani (en route depuis 8 ans), de Dahlia et Peter (motocyclistes bulgaro-allemand), de Clément et Julia (merci 1000 fois pour le pneu, cadeau de Noël avant l’heure), de Norbert (cyclo autrichien branché) et d’Anthony et Jim.

Univers desertique dans la vallee de l Indus
Le lendemain, esprit débrumé, on escalade notre première butte qui culmine à 3500 m seulement, facile, compte tenu d’ou l’on vient. Le paysage est désertique, le sol de sable est parsemé de petits cailloux. Les montagnes au premier plan sont trempées du même matériaux, plus loin la roche devient apparente. Un canyon ou s’écoule l’Indus nous mène à Basco, autour du village, la végétation s’épanouit. Depuis le monastère aux façades blanches accroché à la colline d’ou le village descend en escalier, on observe les toits plat des maisons typiquement Ladakhis ou sèchent des bottes d’herbe en prévision de l‘hiver, les champs de blé miele prêts à être récoltés et les peupliers verts qui s’écouent le long de la rivière et les demeures à large fenêtres soutenues par des poutres massives en bois sculpté. Des drapeaux à prière multicolore flottent partout. Les statues de Bouddha en terre sèche, recouvertes d’or qu’abritent les temples sont tellement hautes que leur torse s’échappent du plafond et s’engouffrent dans des étages supplémentaires plus étroits. Le cadre est magnifique autour de notre feu de camp en goûtant la Tchang, bière tibétaine, c’est agréable de retrouver la tente.

Stuppa, autour des villages la vegetation est intense

Vue sur les cultures
Deuxième bosse à 3500m. Des Yak se promènent, aucune pousse de végétation à l’horison. Un motocycliste nous dépasse, c’est Viki qui a appris hier à maîtriser cet engin. Dernier au revoir à notre compagne de quelques jours. La descente est un vrais plaisir pour les yeux, des pans de montagne dans tous les tons minéraux se superposent à l‘infini. La Zanskar (rivière) se jette dans l‘Indus en y apportant des tas de sédiments qui colorent des traînées d’eau avançant rapidement vers l’aval. Des villages plein de vie, les moissons à croupis, à la serpette, les énormes moulins à prière colorés, sonnant au rythme de leur tours sur eux-même, des vendeuses d’abricot à l’air clownesque, coiffées de bonnet tibétain de laine et de feutrine, pointus et recouvrant les oreilles, les Stuppas blanches surmontées d’une pointe colorée portant un croissant de lune sur fond de paysages himalayen. On suit le flot de la rivière dans un canyon qu’elle a creusé, serpentant entre les montagnes rocheuses ou la géologie a dessiné des motifs spectaculaires, dégradé de couleurs. Le camps est établi sur le limon au bord du fleuve sacré ou l’on prend un bain, rêveurs, un peu scotchés  d'être là.
L Indus et notre campement
 Une montée en épingles qui fait transpirer et travailler les cuisses, et puis c’est Lamayuru. Village de carte postale, niché à flanc de montagne, tout en haut la Gompa (temple) qui semble flotter à travers les drapeaux à  prière qui apaisent et égaient à la fois. Trois femmes viennent prendre le thé après s’etre inclinées pour prier face à la Stuppa ou on a cru bon d’établir le camps, moment de partage les yeux dans les yeux, le regard franc des Ladakhis, les paroles directes, ni chaudes, ni froides, les idées claires. Le foulard qu'elles portent sur le visage sert autant à les protéger du soleil que de la poussière. On rit ensemble des ânes qui échappent sans cesse à leur berger, qui les rattrape toujours, sans jamais, pour autant tourner à l'envers autour de la Stuppa, ce serait une offense! Nuit sous le ciel claire, lune plaine, les étoiles, dans l'immensité de l'Himalaya!

Village de Lamayuru, vue depuis notre campement
La montrée du col de Fotu La (4108m) s'effectue sur un bitume parfait, l'armée de petites mains qui s'y atèlent et l'utilisation assidue de la route par l'armée indienne pour "protéger ses frontières", l'explique. D'un sommet triangle descend une langue littéralement multicolore, vert, jaune, rose, gris et bleu. Un souhait au sommet et c'est une longue descente vers Khangral, on entre dans le Kashmir musulman. Les mosquées trônent au milieu des petits bourgs, les façades des maisons ne sont plus blanches mais brutes, on utilise les ânes pour le transport, l'Imam Komeini réapparaît en poster dans les thé stall, certains visages tannés portent la barbe, des bonnets de laine plissés au dessus du crane, les trais pourraient être pakistanais, mais tout aussi bien chinois ou thaïlandais, mélange étrange! Une ribambelle de gamins assiste à notre souper,  l'air dégoûté par nos pâtes au fromage. Le chef de famille veut brancher une lampe au fil électrique au dessus de nos tentes, la serviabilité musulmane. Le lendemain, c'est Namika La (3880m) qui nous attend, notre dernier col à quatre. Après Kargil, Anthony emprunte la direction de Srinagar pour un retour progressif vers l'ouest. Les mecs célèbrent la séparation avec une ":meat night". En gros, ils vont d'échoppe en échoppe et commandent tout ce qui peut contenir de la viande. N'étant plus en terre bouddhiste, la ville en regorge. Poulet frit, brochettes d'agneau et ragoût de mouton, voila un Jean-Da heureux!

Karguil, petite ville commercante
On suit maintenant la Suru (rivière), afin de rejoindre la mythique vallée du Zanskar, accessible en hiver qu'après plusieurs jours de marche sur la rivière gelée. En ce qui nous concerne, il faudra emprunter une route non-bitumée et s'élever jusqu'au col de Pensi La. Pour l'instant, la route est bonne et traverse à intervalle réguliers des petits villages tout affaires aux récoltes. Beaucoup de monde au bord de la chaussée, les enfants en uniforme marchant sur des kilomètres pour se rendre à l'école, les hommes portent de longues chemises jusqu'aux genoux et les femmes sont à nouveau colorées, on nous demande "where are you going" et "one pen" (stylo ou argent?). Les saules et les abricotiers ombragent et protègent de la chaleur. Les paysages deviennent alpins, des monts pointus et rocheux abritent des sentiers qui zigzaguent magnifiquement dans les pentes raides, pour aller ou? Il y a aussi des bis qui abreuvent les cultures.

Deuxième jour, on découvre les trous, les bosses et la piste caillouteuse. Notre progression en prend un coup, mais qu'importe, la vue majestueuse sur le massif de Nun (7155m) avec au premier plan les rives herbeuses de la rivière ou les vaches, les yak paissent en liberté. Ses compagnes culminent seulement 700m en dessous de lui, mais son blanc immaculé et sa stature étendue, lui confère une place de choix. Des glaciers dégringolent de ses entrailles dans toutes les directions. Tout au long du jour, on ne peut détacher nos yeux de ce mastodonte, sublime, enserré par des montagnes de roche grises.

Nun 7155m, elle inspire le respect
Les habits rapiécés, sales, et vieillots des enfants qui observent notre installation de camp laissent présager du dénuement, mais les maisons  des villages que l'on traverse, sont de construction robustes, le crépit est même décore de motifs réguliers, partout, des vaches, des poules, des oies, des pompes à eux métallique abreuvent les habitants, les récoltes vont bon train et les épis sèchent en quantité dan les champs.

Toujours Nun en fond
Un homme joue les acrobates en sandales dans un talus à pic pour couper quelques végétaux pour ses bêtes, aucune herbe ne sera perdue. Camping dans un pâturage strillé de ruisseaux, idéal pour prendre un bain et rédiger quelques notes face à un Tableron glace baigné de soleil. Des troupeaux de chèvres, de moutons et de yaks s'invitent entre nos tentes, un décor mouvant, magique et plein de vie. Tout à coup, une explosion, le mont gelé a perdu quelque rochers, de la fumée s'en échappe, impression d'être minuscule dans cette immensité.
Notre campement dans le paturage
A Parkatchok, on peine à se faire vendre ce dont on a besoin (oeuf et pain), mais un vieillard au sourire franc et édenté et un regard sympathique nous cédera biscuits, barres chocolatée et tabac. Sortie du village, une langue glacière échoue ses falaises bleues dans la Suru, ce doit être d'un des enfants de Kun (7090m). Une cascade dégringole de la glace à mi-hauteur. Plus haut la surface gelée s'accroche à la roche, le sommet est bombé  et immaculé. Atterrés par ce spectacle, cadeau de Pacha Mama.

Le glacier s invite presque sur la piste
 Le temps est menaçant, on passe l'après-midi, dans un abri de pierre et de béton abandonné au bord de la route, à préparer des chapatis (galette de pain plate) maison avec de la farine offerte par Anthony. On invente même une recette sucrée aux flocons d'avoine, ou quand le rationnement développe la créativité! Les nuages n'auront égrainés que quelques gouttes, et au petit matin les rayons du soleil viennent caresser le sommet blanc et gelé qui nous a couvé tout la nuit, ainsi qu'un énorme glacier qu'on ne découvre qu'à présent, perché dans les hauteurs et qui ferme la vallée dans notre dos.

Les roues sur les cailloux et la tete dans les glaciers
 Une montrée de 5 kilomètres nous attend, ça parait rien mais sur cette route à la surface semée de pelleux, 300m de dénivelé, ça se mérite. Récompense au dessus de nos espérances. Face à une splendide Stuppa décorée de  multiples drapeaux à prière, se dévoile un autre profile de Kun qui s'étend de toute sa longueur, entre deux pans de montagne rocheux. Un nouveau glacier s'en échappe. On sait qu'on ne rêve pas mais on ne peut y croire. C'est si majestueux, si imposant, impressionnant!

Stuppa qui indique que les villages vont etre bouddhiste
Entre pâturage et marécage, le limon divise la Suru en de multiples bras, on joue à cache-cache avec les marmottes. Les chèvres, les moutons, les vaches et les chevaux en troupeau paissent sur fond rocheux. Sur la droite, entre chacune des montagnes, un petit glacier amène sa contribution aquatique à la rivière. On rencontre Rupert, un cyclo allemand qui décide de faire route avec nous, les chevaux galopent la nuit entre nos tentes.

"Village" au fond de vallee de la Suru

Notre campement pres de la Suru
Pour charger les batteries des caméras et humaines ( un refroidissement qui s'explique par les températures négatives de la nui a enrhumé Léo), on fait halte pour la journée à Rindum, quelques maisons ladakhies à l'embouchure d'un désert pierreux, encerclé de montagnes à la morphologie toute différente et toutes aussi belles les une que les autres. Sur un promontoire rocheux se dresse, comme par magie un  monastère. Le cadre ne laisse pas à désirer, malheureusement on y aura un peu l';impression d'être pris pour des dollars sur pattes. Le Home Stay nous laisse sur notre faim, une portion de riz préparée sans entrain et pas même partagée, puis on nous envoie au lit??!!

Les enfants du village de Rindum
Gompa de Ringdum
En suivant un affluant de la Suru, on s'élève vers Pensi La (4480m). Un camp nomade, composé de simple pierres pour les murs, de bâches et de tout ce qui a pu être trouvé pour tenter d'abriter du vent, garde des bébés yak étonnement indépendants, curieux et craintifs. Quelle drôle de quotidien! Une vie bien rude!

Sur la montee du col Pensi La
Les sommets qui nous font face sont que de roches, de la glace s'y accroche dans les parties supérieures. Au sommet, une surprise énorme nous attend, des touristes allemands rencontré quelques jours plus tôt, nous offrent deux paquets de biscuits artisanaux. On-ils conscience à quel point ce cadeau nous rempli de bonheur? Leur guide nous apprend à dire "Ma Démo"", Très Beau" en Ladaki... Mots utiles ici!!!

Sommet du col Pensi La
Sur la descente, c'est Drag Drung qui nous offre sa langue de glace, gigantesque telle celle d'Aletch. Du jamais vu! Son dôme se cache derrière des sommets plus proches et son autoroute de glace coincée entre deux moraines descend jusque dans la plaine bien au dessous de nous, d'elle jaillis la Tod Chu Doda que l'on suivra jusqu'à Padum. Le camp est établi dans une cabane de chantier aux parois de plastique. Ses formes arrondies et son emplacement dans cet univers hors du temps, hors de la réalité, nous fera la nommer "The Mother Ship".
Langue de glace juste apres Pensi La

Notre "vaisseau mere" qui a abrite notre nuit a 4100m
La vallée ne semble ne jamais descendre, la piste caillouteuse suit le coteau des montagnes a l'infini. Sur la droite des vallées s'ouvrent sans cesse. Au fond, des glaciers, leurs déchets de gravats et d;alluvions encombrent jusqu'à l'embouchure de chacune d'elles. On pic-nic au pied d'un pan de montagne rougie par des végétaux, couleurs intenses! Puis ce sont les premiers villages, les cultures, des bonshommes qui se promènent chargés de botte de foin immenses sur leur dos.
plus de 200km de piste caillouteuse
Les couleurs annoncent l automne

Les cailloux = maux du corps et maux du velos
 On est encore une fois a la recherche de pain et l'un d'eux nous invite chez lui pour un déjeuner assis en tailleur sur des matelas devant des banquettes en bois qui sont ici des tables. Le sol est couvert de tapis pour isoler du froid, les bouses de vache crépitent dans un petit poêle sur lequel on cuit les pains et sur une sorte de commode, trois planches assemblées, est posé un réchaud à gaz. C'est le seul meuble haut de la pièce, de la maison. Lotus nous sourit quand on lui demande si on peut rester pour l'aider au champs. Oui, on peut porter un chargement de paille sur notre dos si l'on veut prendre une photo. On insiste, il ne s'agit pas de ça! On veut vraiment travailler auprès de sa famille toute la journée. L'expérience sera une réussite! Une lanière ornée de deux boucles en bois en son centre est étalée sur la terre du champ ou des fagots d'herbe sèche attendent qu'on les disposent sur cette installation. Puis on passe les brins libres dans les annaux afin d'enserrer le chargement, on passe ses bras dans ces lanières, le tout forme comme un immense sac à dos qui dépasse le porteur de plusieurs tètes. L'opération est un art, se dresser avec ce monticule sur le dos, une prouesse, escalader l'échelle sommaire jusqu'au toit, un tour de force. Puis. il faut arranger le foin de façon ordonnée à l'aide d'une serpette et c'est reparti! Les femme m'épargnent, me chargent moitié moins qu'elles. Heureusement pour moi, car se sont des Hercules, inépuisables!
Toutes les deux heures, une pause regroupe toute la famille dans la cuisine de la grande demeure, on nous sert des hectolitres de thé au beurre, on s'y fait peu à peu. On nous gave de pain tibétain, de Kart (fromage frais), de Tchang à la Tsampa (farine), de chapatis... A midi, on mange le riz aux légumes (Dahl Bat) préparé par les hommes. Ici les taches paraissent asexuées. Jim nous a quitté, craignant que nous ne soyons des encoubles au labeur quotidien, mais l'insistance avec laquelle on nous ramène aux champs après le repas nous laisse présager du contraire. Le soir venu, on monte notre tente sous l'oeil curieux et attentif de la grand mère portant l'habit traditionnel. De son regard plein de rides, au milieux de son visage tanné digne d'un portait dans GEO Magasine, elle nous invite à l'intérieur, nouveau gavage, jamais au cours de notre voyage on aura rencontré une famille qui mange autant! On nous remercie à mainte reprises... et nous alors, comment les remercier de ce moment de partage? Vous nous avez ouvert une porte sur votre mode de vie, nous avez offert l'authenticité, laissé découvrir un pan de votre quotidien. Merci à vous tous pour votre générosité!
Leo se transforme en paysanne Zanskari
Padum, la Capitale (????) du Zanskar est un bled étrange. Planté au milieu de nulle part, au coeur des montagnes, pour ainsi dire inaccessible, elle prodigue pourtant tout ce dont on peut avoir besoin : temple, magasins qui vendent absolument de tout (sauf des briquets), école, poste de police, campings, hôtels, centre médical, mosquée, internet café qui marche par intermittence, station essence fonctionnant sur appel. Les biscuits de la boulangerie du coin sont tellement délicieux que Jim en tombe à la renverse, à moins que ce ne soit du aux trop plein de whisky au bar de la ville. Oui un bar! Ça vaut le coup d'être souligné. Il faut imaginer, un sol de béton, des chaises dépareillées, une lumière blafarde d'un générateur ronronnant... mais une présence féminine ne semble pas choquer outre mesure.

Le 4 septembre au matin, on met des voiles direction Singo La (5100m) laissant Rupert s'en retourner vers Kargil. A bientôt ami voyageur!

2 commentaires:

  1. Bravo les amis, encore de belles aventures, ca n est pas tjrs rose, mais c est peut etre aussi ce qui fait la beaute du voyage au final... Bonne route vers le nepal, des bises, on vous suit!!!! anne-laure et guillain

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