vendredi 9 octobre 2015

Croatie: Ilok - Vukovar - Karlovac - Bosanci


Article publié par Léo:


On traverse le Danube et on arrive en Croatie. De ce côté là, la rive est vallonnée. Ça monte et ça descend entre champs de maïs et villages complètement déserts. Les commerces sont fermés, seuls quelques hommes squattent les terrasses des cafés. C'est le 15 août, la fête de l'Assomption, et comme dans les communautés rurales croates, on est particulièrement attachés aux traditions catholiques, c'est un jour chômé. L'inactivité villageoise est troublante,  est passée la population?


Croatie, Ilok Église au sommet d'un fort 


Sur les conseils d'un cyclo roumain rencontré à Novi Sad (Serbie), je passerai la nuit sur un petit espace offert gratuitement aux campeurs voyageurs dans la bourgade de Sarengrad. Les gendarmes ne comprennent pas pourquoi je tiens à m'assurer que je peux m'installer librement. Pour eux, cela parait logique. Suivant l'exemple des familles qui profitent de leur jour de congé, je prends un bain douteux dans les eaux peu accueillantes du fleuve. Le fond est vaseux et l'eau tachées d'essence, d'écume blanchâtre en surface et d'algues microscopiques en suspension. Ça n'a l'air de gêner personne. Les hommes nagent dans le courant, les enfants sautent allègrement depuis une barque. Les vieux papés qui sont venus se promener là, s'inquiètent que ma tente soit toute proche d'un nid de grosses bestioles volantes et alertent des jeunes qui parlent anglais. On m'accorde la paix, mais on garde un oeil protecteur sur ma personne. Les familles rentant de pic-nic en petit bateau à moteur me demandent si j'ai besoin de quelques chose, on m'indique une fontaine d'eau potable, on m'assure qu'ici je passerais une bonne et tranquille nuit et m'offre quelque gentilles paroles. 


Croatie, Sarengrad

Je n'ai pu retirer d'argent ni hier, ni aujourd'hui, on est dimanche, les banques sont fermées Je décide donc d'attendre le lendemain en m'installant pour l'après-midi sur la rive du Danube à Vulkovar. Le nez plongé dans mon journal de bord, je n'entends pas Anté arriver. Il m'invite chez lui. Si tôt dans la maison, je repère qu'il vit seul et adapte donc mon comportement à cette situation. Mon nez est aiguisé car en fin de soirée, ses intentions à mon égard seront sans équivoque et il faudra alors que je remette à l'ordre ce monsieur qui a pourtant dans les 65 ans. Et dire que dans quelques jours, je m'attirerai les regards des adolescents de l'équipe de foot de  Ustica (Frontière bosnienne). Décidément le chromosome Y doit détraquer le cerveau! Rien de bien méchant et je sais (sens) ne courir aucun danger. Cependant ces situations m'attristent. C'est tellement décevant, Quel dommage que certaines personnes ne soient pas capables d'aller à la rencontre de l'altérité dans l'humanité. L'échange pure et profond, d'être humain à être humain est pollué par la luxure et l'orgueil. Certains sont prêts à travestir, à brader leur personnalité, à prostituer leur âme dans l'espoir d'obtenir quelques avantages insignifiants: un regard, un sourire, une poignée de main, une bise, de l'attention. Ils croient ainsi gagner la partie, en extorquant à l'autre un don qu'il lui a forcé à faire. C'est une forme de violence, de vol, de viol moral. Ces gens ne comprennent pas que hors de ce jeu, ils auraient reçu bien plus: le cadeau du partage authentique issus de sentiments sincères, honnêtes et intenses. Ils ne savent pas ce qu'ils perdent, à côté de quoi ils passent. En donnant des coups de pieds dans les limites personnelles, ils rompent le cycle vertueux de la confiance et de l'Amour. Le contact devient technique, artificiel, utilitaire. C'est un jeu auquel je n'ai pas envie de jouer. Mon temps et mon énergie me sont bien trop précieux pour que je les gaspillent à rappeler les règles, à porter un masque, à jouer un rôle. cela ne m'intéresse pas.

L'après-midi avait pourtant bien commencé avec un délicieux repas, une leçon de croate, une baignade à la plage et des explications passionnantes à propos de l'histoire de la ville. Vulkovar n'était qu'un tas de cendre au terme de la guerre enter la Croatie et la Serbie (1995). Ainsi, l'ensemble de ses bâtiments ne sont pas âgés de plus de 20 ans. Seul le château d'eau est reste debout, mais il est crible le trous d'obus, inutilisable bien entendu. Les autorités ont choisi de le conserver en l'état comme symbole et souvenir. 



 Croatie, Vulkovar: château d'eau


Les banques ici, ne changent pas des Dinars serbes, j'y perçois une forme de racisme pleine de rancoeur. C'est compréhensible et en même temps assez triste. Cependant à nouveau la chance me guide. Au hasard d'une boutique de photo, on me propose un taux de change plus avantageux que l'officiel. Est-ce possible? C'est ainsi que je repars de Vukovar avec plus d'argent que quand j'y suis arrivée!!!


Un grand axe mène jusqu'à Nustar, puis j'oblique à droite: plus une voiture sur cette route campagnarde. Les tournesols tirent la gueule, le temps de la recole a sonné! La nature se décline en couleurs termes qui vont de l'or au vert olive. Les champs de blé sont rasés ou déjà labourés, la terre est lourde, brune, riche. Sans lumière et sans éclat, les paysages deviennent tristes et lassants.Le ciel est plein de nuages et parfois des rayons de soleil percent de gros paquets noirs, ça fait jouer les couleurs sur la terre et les villages toujours aussi calmes. A midi, les clochers sonnent, je mange une pastèque assise dans le parc de l'église d'un village sans nom au bout d'un sentier de gravillons. 

Une Cathédrale monumentale au centre de Dakovo attire l'oeil depuis loin à la ronde. Cette ville est le centre religieux de Slavonie. Elle est aussi fameuse pour ses chevaux lipizzans apparemment très recherchés. Depuis là, je m'engage plus Ouest, le long d'une longue vallée que je remonterais sur plusieurs dizaines de kilomètres.


Croatie, Cathédrale de Dakovo


Je suis fatiguée, par crainte d'effaroucher les vieillards somnolants sur des bancs devant leur maison, je préfère demander de l'eau au tenancier du café de Levanjska Varos. Il me propose de boire quelque chose et encore une fois mon flaire opère. Je m'installe et sa femme nous rejoint. Il est artiste peinte à ses heures, les petites filles de la maison me montrent fièrement ses oeuvres. Tout le monde m'a adopté en moins d'une demi-heure. Le camps est monté derrière le bureau de poste dans le jardin adjacent au café. La maîtresse de maison m'invite pour déguster un délicieux alcool de cerise maison. Miriana m'explique tout sur sa famille, son jardin, sa production de conserves, de confiture et de Slivovija (alcool de pruneaux)  annuelle, le village, son passé, ses habitants, me montrent les bâtiments officiels, joue les traductrices pour ses deux charmantes et timides petites filles, m'invite à dire bonjour à son fils qui l'appelle d;Allemagne à travers Skype. Elle m'apprend des tas de mots croates et cherche assidûment les traductions allemandes de ce que je ne comprends pas. Quand aucun mot ne marche, on joue au langage des signes, et on rit. La communication passe par le coeur! Miriana, l'innocence de la gentillesse campagnarde, merci!


Croatie, Levanjska Varos: Miriana est fière de vous présenter son brandy de cerises  maison!


Au matin, les deux petites princesses de la maison ne veulent plus me voir partir. Elles ont mis leur timidité au placard et me supplient de rester... juste encore un jour... s'il te plaît!!! On prend le déjeuner et je traîne, leur prépare du cacao froid et leur coupe des tranches de pastèques. La grand-mère nous fabriques des sandwishes et me ressert abondamment de café bien chaud.  Quel bonheur, quelle rencontre superbe, que de tendresse et d'Amour partagé. Avant que je ne monte en selle, on m'offre deux belles roses aux senteurs délicieuses. Merci les filles, merci petites anges!



Croatie, Levanjska Varos


Ici pas de luxe. Les maisons sont en brique orangées apparentes. les silos à maïs sont des cadres en bois aux faces grillagées, protégés par un étroit toit de tuiles. Ils sont à moitié pleins. Dans la cour des fermes on fend du bois, on meule, on fabrique une table, on chasse les poules et les dindons géants, on nourrit le chien ou les cochons noirs, on ramasse quelques fruits, on s'occupe des potagers plein de légumes. L'atmosphère a changé, les sapins sont omniprésents. C'est la montagne, l'air est frais et pure. Par paliers je m'élève dans des pentes boisées allant de 5 à 9%. Un rayon de soleil, un banc, une source d'eau et un foyer pour un feu de bois aménagés sous un très haut saule pleureur, une place parfaite pour le repas. Je n'aurai acheté aucun fruits au cours de la traversée croate. Les pommiers et les pruniers sont partout, il suffit de se baisser (je ne cueille pas sur les arbres) et de croquer dans un fruit juteux (parfois véreux!)



Croatie, arbres fruitiers en pagaille!















Croatie,, l'abondance!



Je rejoins un axe plus couru et retrouve le trafic sur la route qui me mène jusqu'à Pozega, ses rues piétonnes, ses cafés, ses commerces, sa vie de gros bourg au charment attrait touristique. Le Jardin de l'ancienne forteresse fait un coin parfait pour une pause qui laisse le temps au ciel de se parer de bleu. Contrairement aux villages, les villes traversées dans ce pays sont plutôt vivantes. Il y a du monde sur les pavés des rues, aux terrasses des cafés, dans les parcs publiques les enfants jouent sur des balançoires et des toboggans, des adolescents se promènent en discutant ou fleurtant, des familles reviennent de courses des bras chargés de cabas. 



Je longe une plaine maraîchère coincée entre des collines au Sud et les montagnes de Papuk (958m) au Nord. Il m'est difficile d'atteindre les berges de la rivière. ce soir je camperais donc au fond du jardin de l'école de Pavlovic. Oui, l'école a un jardin, un verger et même un potager. A l'arrière, dans un petit coin, une tombe. La mort côtoie la vie avec simplicité. Au fond, c'est la rivière, aucune barrière. Le bons sens remplace les grillages. Le professeur attend que sa femme soit rentrée et l'emmène avec lui pour venir s'assurer que je n'ai besoin de rien et m'inviter à me servir librement de tous les légumes. Puis il sort sa veille voiture de la grange, embarque son fusil et part pour une nuit de chasse. C'est les vacances, la rentrée n'aura lieu qu'en septembre. 



Au matin, alors que je plie le camps, un vieil homme s'approche. Il m'invite pour le café. Sa femme, tout d'abord méfiante, me serre une tasse chaude sans un sourire. Leur maisonnette est délabrée, il n'y a pas d'eau courante et tout est vieux et bancal. L'homme se fait cependant une joie de m'inviter, de me montrer ses trois poules et d'utiliser les trois mots d'allemand dont il se souvient de ses années passées là bas à travailler comme tailleur. Son fils travaille dans l'armée croate, il dit que ça rapporte. Mais ce n'est évidemment pas ni lui, ni sa femme qui bénéficient de ces revenus. Il branche sa télé sur une chaîne francophone. A l'écran défile la saga d'un jeune homme politique français à la peau noire qui se dit victime de racisme dans le cadre de la campagne électorale. Chacun ses problèmes, ici, il s'agit de regrouper quelques pièces pour aller acheter le pain au passage du camion-boulangerie. Le pain n'est que pour moi, mes hôtes n'ont pas de dents, ils ne peuvent pas le mastiquer. Je leur offre une plaque de chocolat et partage avec eux la délicieuse confiture offerte par Nicoleta à Belgrade. Ils en raffolent. La femme fume une cigarette face au mur, seule dans un coin mais lorsque je m'en vais, elle m'offre un grand sourire et ses yeux disent merci. Je crois y lire de la honte, elle sait que sa maison n'est pas bien vaillante. En ce qui me concerne, je me sens privilégiée d'avoir pénétrer la réalité de cette famille, d'avoir vu l'envers du décore des jardin fleuris, des potagers et vergers opulents, des poules et des cochon dodus dans les cours et de l'apparente joie de vivre des croates. Merci!



Je m'engage en direction de la chaîne des Papuks. Autrefois parait-il, cette région était riche et prospère. Elle comptait des industries, plusieurs universités, des administration. Aujourd'hui, après la guerre, beaucoup de villages sont déserts. Les ruines laissées à l'abandon, les murs crépits de balles, les toits éventrés sont recouverts de ronces. Des arbres poussent un peu partout entre les pierres des murs. Le long de la route des panneaux présentent des têtes de morts sans équivoque, la région est minée... toujours. On me dira que l'argent du déminage est détourné, personne ne semble pressé de nettoyer et sécuriser les lieux. 

C'est une surprise de rencontre ici, au bord de la route Nadin, une professeure de philosophie serbe à la retraite, C'est si inattendu que je décide de profiter de l'occasion pour attendre avec elle, en compagnie d'autres villageoises, le camion-épicerie qui passe sur la route tous les deux jours. A son bord, du café, du pain, des biscuits, de l'huile, de la bière, de la viande... toutes ces denrées qu'aucun commerce ne vend dans les environs. Quel délice d'observer ces veilles femmes vêtues de noir, un fichu sur la tête, brandissant leur sac de coton à l'arrivée du convois. Elles rentrent chez elle branlantes sur leur frêles jambes, vers leur maison dans la montagne et leur isolement qui ne les a pas rendues sauvages pour autant. Des hommes restent quelques instant accoudés au comptoir ambulant, buvant la bière fraîchement achetée, échangeant rapidement quelques nouvelles avec l'épicier qui doit continuer sa tournée. Le bistro, ça n'exister pas dans les environs. 


Décidément je n'avance pas très vite dans cette généreuse Croatie. Cette fois c'est Hans qui m'a arrêté. Il est allemand, marié à une croate depuis très longtemps. Il tient à me payer le café, il semble avoir besoin de compagnie, de discuter. Je me prête volontiers au jeu, Il se raconte sans détour. C'est extrêmement touchant.


Il me faut encore monter à travers une forêt dense, sombre (noire dirait Charly!). Après la moiteur des forêt tropicales me voila dans la fraîcheur des forêts continentales. Ici, elle est composée de très hauts chênes noirs. Le sous bois sont dégagés, sur un tapis de feuilles morte pousse de la mousse. Les animaux sont absents, pas un bruit, pas de vie. Ça me surprend. Les routes sont désertes, des maisons éparses ne forment pas des villages à proprement parler. Le ciel est très chargé et l'orage ne devrait pas tarder. Je rejoins la plaine et décide de m'arrêter à Jasenovac  je pense trouver des sources d'eau chaudes. A mon arrivée sur le site, le musée est fermé mais un garde est là. Je lui demande s'il est possible de camper sur la magnifique pelouse qui entour un lac au bout duquel trône une sculpture. Je présume que c'est de là que jaillit l'eau. Sa réponse est claire et définitive: "non". Et sur le parking: "non". Ça m'intrigue, jamais dans tous les Balkans je n'ai essuyé un refus! Et " se situe la source exactement?" Pour me faire comprendre je fais le avec mes mains le signe du monument et mime l'eau qui sort.. du moins c'est ce que je pense mimer... Il m'indique l'endroit, mais me précise, sur mes demandes qu'on ne peux ni y camper, ni s'y baigner, et qu'en fait il n'y a rien vraiment à voir??? Je commence à être septique. Je le remercie et lui indique que je vais regarder un peu les panneaux explicatifs avant de partir. C'est seulement à ce moment là que je réalise ma très grossière erreur. Il ne s'agit pas du tout d'une source d'eau chaude, mais d'un mémorial du Camps de Concentration qui se trouvaient là durant la Deuxième Guerre Mondiale. La honte!






Croatie, Mémorial du Camps de Jasenovac


Il pleut pour de bon. Je m'approche du terrain de foot d'un petit village juste à la frontière bosnienne. Bien entendu que je peu m'installer pour la nuit sous le couvert de la cantine. Un garde frontière en patrouille me tient compagnie en attendant la fin de l'entraînement. Une chouette rencontre très instructive quant aux réalités administratives de ce pays, l'état de l'économie nationale, les projets d'entrée dans l'Union Européenne, les spécialités locales, la fonction de gardien de la paix, les traditions culturelles croates... Troisième mi-temps, on m'invite pour la bière. L'équipe se joint au douanier dans l'enthousiasme et l'admiration pour les récits de voyage que je partage de mon mieux. Le lendemain, il pleut encore des cordes, une journée sous tente à attendre que ça passe. 



Croatie, village de la région de Jasenovac


Je suis à présent la Una, cette rivière qui sépare la Bosnie de la Croatie. Le temps est humide et brumeux. Les maisons sont pleines de traces de balles, beaucoup son abandonnées. Les occupants ont sans doute dû partir pendant le conflit et ne sont pas revenus, ou ils ont construit à neuf... ailleurs. Comment ça se passe un retour dans un foyer qu'on a fuit sous le bombes? Comment revenir dans un endroit qu'on appelait "maison" et duquel on a pourtant été chassés? On m'explique que les maisons appartenaient sans doute à des familles d'origine serbes qui vivaient naturellement ici avant le conflit. La plupart des façades sont décrépites, souvent les murs sont en briques apparentes. Qu'est ce que ça peut bien signifier ici l'acte d'entreprendre des travaux d'entretien? Reboucher les trous laisser par l'ennemi? Repeindre en belle couleur uniforme un lieu  peut-être des proches sont morts,  on a eu peur...pour sa vie. Non, ce n'est pas anodin. 



Croatie, Hrvatska kostainica, frontière bosnienne: brume matinale sur la Una


Au petit matin, je me réveille au doux chant du Muezzin qui appelle à la prière depuis le minaret sur l'autre rive. Un son qui avait été bien longtemps absent. Sa voix me berce et me replonge dans un tas de souvenirs merveilleux. Je survole les Balkans, atterris en Turquie, aperçois la veille Mosquée d'Edine,  les Chemine des Fées capadociennes, les Derviches de Konya, les neiges kurdes. Fais escale à Tabriz, traverse le désert Iranien, atteins la cité sacrée de Qqom, vole au dessus des Cheminées des Vent de Kashan, d'un bon me retrouve au Cachemire, au coeur de la veille ville de Srinagar... Un beau voyage en une chanson, un beau réveil!



Croatie, près de la frontière bosnienne


Ça monte vers la source de la Una. Le soleil est revenu et l'ambiance est paysanne. Les talus sont fauchés à la faux, les couleurs sont étincelantes, certaines maisons en bois. J'ai un plaisir fou et oublie toute anxiété concernant les pentes. Je gravis le col de Vratnik fluidement, sans difficulté, enchantée du paysage. Un régal que de se retrouver dans cette ascension féerique.            


Croatie, près de la frontière bosnienne


Croatie, col de Vratnik:


Le soir, après avoir puiser de l'eau dans le puis d'une maison je campe près de Maja. Au pied de l'église, tout à côté d'un vieux pommier solitaire que m'offre des casses-croûte à volonté. Un homme arrive pour piqueter un champs, dans la poche avant de sa chemise une bouteille de rakie (eau de vie de raisin), sa ration pour le jour. C'est tout naturellement qu'il m'en propose un coup, je refuse. Plus tard, une famille endimanchée se présente, ils viennent baptiser le nouveau-né. J'aime jouer les observatrice de vie quotidienne. Depuis le retour en Europe on me laisse assez d'Espace et de Temps pour regarder, regarder vraiment. Dans la soirée, je suis sous tente et tout à coup un grand "boum". Qu'est ce que cela peut-il bien être? Peut être un oiseau s'est il heurter à la tente ou un gros gland c'est détaché de l'arbre qui m'abrite. 




Croatie, Maja


Ce n'est que le lendemain matin que je constate qu'en réalité, c'est l'un des arceau qui a craqué. Je craque moi aussi, plonge instantanément dans la déception profonde. J'ai soufferts le martyre avec ma tente "made in China" les mois derniers, maintenant j'en ai une nouvelle, supposée de qualité, et le problème réapparaît tout de même!!!!!! Furieusement, je fume clope sur clope, insultant cette maison de tissus, maudissant le sort. Puis regardant la situation de l'extérieur, je ris. Je relativise, touche la terre doucement, respire. ajoute un peu d'humour. C'est insensé, improbable, utopique! C'est comme un film comique, sauf que c'est moi l'acteur principal! Quel poisse., Je n'ai pas le courage de fixer le problème sur le moment et replie le camps, pédale pour oublier que ce soir je n'ai plus de "chez moi" utilisable... 

La route vallonne d'une colline à l'autre en direction de Karlovac. C'est épuisant un terrain si peu régulier. A la hauteur de Dvor, souhaitant passer par les montagnes, je m'arrête pour demander mon chemin, On me conseille un itinéraire mois difficile et on m'invite pour une bière que cette fois je ne refuse pas. Je profite du bagou et de l'anglais parfait de Mateja, la serveuse, pour me renseigner sur les possibilités de trouver un magasin "outdoor-camping" à Karlovak. Rien n'est très claire, personne n'est sure, mais il semblerait que ce soit possible. Le jeune  homme de la table d'à côté propose de payer sa tournée, je prends. Une cycliste américaine arrive impromptuement. Elle est  en route pour les fameux lacs Plitvicka, que Jean-Da et moi avion visité à l'aller en compagnie de la famille de Micho et Jelena. Je l'invite pour une mousse. Mes idées commencent à se brouiller, je veux croire au miracle, je sais pourtant pertinemment que la tente ne va pas se réparer d'elle-même. J'ai juste pas le courage d'y penser, de me confronter à ce problème pour l'instant. Quelque chose de positif va sortir de tout ça, sans doute. Tout le monde s'enquiere de ma présence ici, demande des information sur le voyage, la route, la destination. Je commence à gagner en succès, on me repaie une tournée, j'offre des Bureks (pâte feuilletéeau fromage). Déjà bien avinée, je finis par réparer ma tente sous le couvert du bar, il s;\'est mis a pleuvoir. Ca tient mais c'est scabreux. On me conseille d'aller demander aux gendarmes si je peux camper dans le préaut juste en face. Ces monsieurs ne peuvent pas prendre la décision de leur propre chef. 'est à dire que ma presence pourrait perturber la population locale... mais le maire sera la demain et il pourra alors se prononcer sur le sujet... Oui, très bien, sauf que la nuit, c'est prévu pour ce soir! Quand je raconte l'anecdote au bistrot, tout le monde éclate de rire. Des indexes se pointent sur les tempes dans un mouvement rotatif (ils sont fous ces flics!). Pour la peine on m'en remet une (de bière). J'ai perdu le compte, je suis saoule, je n'ai pas d'endroit  pour dormir, ma tente n'est toujours pas correctement réparée et je n'ai plus aucune capacité à reprendre la route. On m'indique le terrain de foot. A la nuit tombant, je m'y dirige en tanguant, monte le camps comme je peux et m'écrase sur mon matelas. Il y a des fois  le réel nous dépasse tellement qu'on crois devoir se réfugier dans l'artifice. Je me suis pas très fièree de moi mais n'ai même pas la présence d'esprit d'y penser! Je m'endore ou devrais-je plutôt dire, je sombre dans l'inconscience. Ce n'est qu'au petit matin, quand je me réveille avec un mal de tête plutôt insignifiant comparé à la quantité d'alcool avalé la veille que je tire la leçon du jour: "les miracles m'arrivent pas d'eux-mêmes, il faut savoir les provoquer et se saouler la gueule n'est certainement pas la façon la plus efficace de le faire". 

Sur la route en direction de Karlovac, un gentil tenancier de camping, m'aidera à fixer la situation un peu plus durablement. je suis toujours très déçue et inquiète pour les nuits à venir, mais du mois maintenant la tente est utilisable.

Je passe la dernière nuit en Croatie à Karlovac, dans un petit part sur les rives de la Korano, sous la pluie, au son d'un concert en provenance du stade tout proche. C'est la fête de la bière, Rien que d'y penser j'en ai des haut de coeur!!!

Le rendez-vous est fixe à 13hoo avec mon ami Yani à la frontière slovène. Je me délecte des dernierès collines boisées qui me mènent vers un rideau de montagnes élevées, juste de l'autre cote de la rivière Kupa qui fait office de ligne de démarcation entre des deux pays. Ces monts sont impressionnants, il va falloir faire chauffer les mollets dans les semaines à venir!!! Je me réjouis cependant de retrouver la Slovenie. Ce pays qui m'avait tant surpris puis fasciné il y a trois ans alors que Jean-Da et moi arrivions naïvement d'Italie. Ce fut ma porte d'entrée dans les Balkans, ce sera aussi ma porte de sortie. Je compte bien savourer ce dernier petit bout de terre balkani, région avec laquelle je suis profondément et sans doute définitivement tombée amoureuse!

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